Article mis en avant

comment utiliser ce blog ?

Pour me contacter, cliquez sur ce lien : me contacter .
Ce blog n’est pas un guide au sens classique. C’est plus le roman d’aventures d’un passionné de vins anciens et de gastronomie.
On peut accéder à ce blog en cherchant sur un mot (restaurant, vin, année, un plat) ou en suivant le calendrier où les titres de chaque sujet sont indiqués.  Pensez à aller sur d’autres pages que la première, car il y a des sujets passionnants à toutes les pages.

Le détail des prochains dîners se lit ici : https://www.academiedesvinsanciens.org/programme-des-diners/

 

 

 

 

(ouverture de Mouton 1918 dont l’étiquette Carlu est en tête de ce blog. A gauche, on reconnait Mouton 1945)

 

 

 

 

 

 

Il n’est pas prévu – pour l’instant – de dialogue directement sur le blog, car je ne pourrais pas le gérer. Mais on peut m’adresser des questions, des commentaires, des suggestions par mail en se servant du formulaire que l’on trouve en cliquant sur ce lien : me contacter .

On peut me joindre sur twitter  @FrancoisAudouze  et pour mieux me connaitre : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Audouze

Comment me joindre

Remarque importante : je ne suis en aucun cas un organe d’évaluation de la valeur des vins ni d’authentification des étiquettes. Pour toute les questions relatives à la vente, l’achat ou l’estimation d’un vin ou à son authentification, j’ai préparé une réponse type, donnant des informations que l’on peut lire ici : Vous m’avez posé une question sur la valeur et ou la vente des vins que vous possédez . Si je ne réponds pas à un message, c’est parce que j’estime que ma réponse n’apporterait rien de plus que la réponse-type. Merci de votre compréhension.

Et sur Instagram à @françoisaudouze

Bulletins du 1er semestre 2025, du numéro 1043 à … lundi, 12 mai 2025

Bulletins du 1er semestre 2025, du numéro 1043 à …

Pour lire le bulletin de votre choix, on clique sur le lien pour ouvrir le pdf de ce bulletin

To read a bulletin, click on the link of this bulletin.

(bulletin WD N° 1058 250513)    Le bulletin 1058 raconte : déjeuner au restaurant le Sergent Recruteur, dégustation en cave et déjeuner à l’Hôtel du Marc de Veuve Clicquot, déjeuner à la maison et déjeuner au restaurant Pages.

(bulletin WD N° 1057 250429)    Le bulletin 1057 raconte : déjeuner dans le sud avec des amateurs, avec deux bordeaux de plus de 140 ans et trois vins d’Algérie dont deux rosés et déjeuner au restaurant du port.

(bulletin WD N° 1056 250415)    Le bulletin 1056 raconte : dîner avec de jeunes dégustateurs chevronnés au restaurant « Lesar », déjeuner au Cercle de l’Union Interalliée et 294ème diner de wine-dinners au restaurant Astrance.

(bulletin WD N° 1055 250404)    Le bulletin 1055 raconte : Caviar et Krug, Château Margaux avec ma fille, déjeuner au restaurant Le Relais Louis XIII, déjeuner au restaurant L’Harissa avec le groupe X-Couscous

(bulletin WD N° 1054 250327)    Le bulletin 1054 raconte : voyage à Saint-Sébastien avec dîner au restaurant trois étoiles Arzak et un autre dîner au restaurant deux étoiles Amelia. Anecdote émouvante sur le restaurant Le Saint-Cyrille à Paris.

(bulletin WD N° 1053 250321)    Le bulletin 1053 raconte : préparation d’un dîner en déjeunant au restaurant Pages, dîner avec un étonnant Moulin à Vent, déjeuner au restaurant le Petit Sommelier pour la première présentation officielle de Château d’Yquem 2022, dîner au Sergent Recruteur avec le propriétaire de Château Climens.

(bulletin WD N° 1052 250311)    Le bulletin 1052 raconte : déjeuner au restaurant L’Ecu de France, deux déjeuners au restaurant Pages, dîner avec mon fils, déjeuner de famille.

(bulletin WD N° 1051 250307)    Le bulletin 1051 raconte : le réveillon de la Saint-Sylvestre avec deux 1919 et deux 1911, compté comme 293ème dîner à la maison et repas d’amis avec deux Cuvée Cathelin Chave.

(bulletin WD N° 1050 250224)    Le bulletin 1050 raconte : 292ème dîner au restaurant Maison Rostand, dîner de Noël à la maison.

(bulletin WD N° 1049 250219)    Le bulletin 1049 raconte : Noël avant l’heure avec mes trois enfants, déjeuner à Rennes avec trois vins du 18ème siècle et d’autres raretés.

(bulletin WD N° 1048 250212)    Le bulletin 1048 raconte : dégustation des vins du millésime 2021 du domaine de la Romanée Conti et 291ème dîner au restaurant Astrance

(bulletin WD N° 1047 250204)    Le bulletin 1047 raconte : Une nouvelle façon d’organiser les dîners.

(bulletin WD N° 1046 250128)    Le bulletin 1046 raconte : déjeuner de conscrits au restaurant Pages, déjeuner de vins étonnants au restaurant le Sergent Recruteur, dégustation de champagnes Krug et repas à la maison familiale de la maison Krug.

(bulletin WD N° 1045 250121)    Le bulletin 1045 raconte : des Master Class du Grand Tasting de Bettane & Desseauve dont ‘assemblage et millésime : l’art du champagne selon Krug’, dont ‘la maison Laurent-Perrier à l’avant-garde de la Champagne’ et dont ‘Le Génie du Vin’.

(bulletin WD N° 1044 250114)    Le bulletin 1044 raconte : La 41ème séance de l’Académie des Vins Anciens au restaurant Macéo.

(bulletin WD N° 1043 250103)    Le bulletin 1043 raconte : dîner « Enigma » pour les gagnants d’une énigme au restaurant Pages, qui est le 290ème de mes dîners et déjeuner ‘rapide’ avec ma fille.

Déjeuner à l’Ecu de France samedi, 10 mai 2025

Il fait beau et l’on annonce une belle chaleur. C’est l’occasion d’aller avec ma femme au restaurant l’Ecu de France où nous pourrons déjeuner sur une magnifique terrasse donnant directement sur la Marne. Des bernaches et des cygnes glissent lentement sur le fleuve. Les bernaches sont bruyantes avec des sons rocailleux assez désagréables.

Le choix des vins est un moment de rêve, tant la carte des vins est aguichante. Je choisis un Substance de Selosse et un Rayas blanc 2010. Je sais que je ne boirai pas tout, mais nous irons le lendemain déjeuner chez ma fille aînée. Nous ferons des heureux.

Mon menu sera : carpaccio de thon / coquilles Saint-Jacques / comté / clafoutis aux pommes.

Le Champagne Substance de Selosse n’a pas comme précédemment la date de dégorgement qui est une donnée précieuse puisque ce champagne est fait selon la méthode de la solera. Il faut maintenant utiliser un code pour avoir les données sur ce vin. Comme je n’aime pas cela, je saurai seulement que ce champagne n’est pas très ancien.

La bulle est belle, la couleur est d’un bel or clair. Le premier contact montre un champagne droit, très cohérent et agréable, mais un peu trop facile à lire. C’est un peu le sous-préfet au champ, qui se laisse vivre. On est loin des saveurs sauvages et d’une vivacité infinie des premiers Substance.

Je l’ai fait goûter à Hervé Brousse, le directeur du restaurant, qui confirme mon analyse. C’est un grand champagne mais un peu trop consensuel.

Le Châteauneuf-du-Pape Château Rayas Blanc 2010 est d’une richesse incroyable. Et il délivre de grandes complexités qui iodlent dans la bouche. C’est un vin parfait, élégant et gourmand. Ma femme avait choisi un ris de veau. C’est sur cette chair que le Rayas est brillant, ainsi qu’avec le comté que d’obscurs fonctionnaires voudraient interdire. Quel crime ce serait.

Le spectacle sur la Marne était intéressant, avec des amateurs de kayaks de toutes formes, des paddles avec ou sans chien, des enfants qui approchaient les bernaches qui s’approchaient elles aussi et une belle péniche privée qui voulait accoster pour déjeuner au restaurant, mais le restaurant était complet.

Nous adorons ce restaurant pour l’atmosphère campagnarde mais aussi « du bon vieux temps ». Un moment de bonheur.

Déjeuner au restaurant Solstice vendredi, 9 mai 2025

Jonathan est un jeune ami qui a participé à plusieurs dîners avant de partir travailler en Australie. Il travaille maintenant en Angleterre ce qui nous a donné quelques occasions de nous revoir. Il m’invite à déjeuner au restaurant Solstice dans le 5ème arrondissement, où nous pourrons apporter nos vins.

Quand il m’annonce qu’il viendra avec un Champagne Krug Collection 1988, c’est une incitation à apporter de grands vins. J’ai pu arriver deux heures avant le déjeuner pour ouvrir mes vins. Guillaume, le propriétaire du restaurant, m’attendait, prévenu par Jonathan. Il a préparé ses outils pour ouvrir les vins mais j’ai voulu lui montrer comment je pratique. Par chance, les beaux bouchons de belle qualité sont sortis entiers et ont libéré de beaux parfums.

Le restaurant ferme normalement le mercredi mais fait aujourd’hui deux exceptions. Un couple d’allemands sont de fidèles clients et n’étaient disponibles qu’aujourd’hui et Jonathan est un ami de Guillaume ce qui a permis notre présence.

Pendant deux heures avant le repas nous avons eu le temps de bavarder. Guillaume connait bien les vins et sa carte des vins, même si elle comporte des vins très jeunes, est intelligente. Il m’a fait goûter d’une petite dame-jeanne un liquoreux très réduit de type Pedro Jimenez, qu’il estime de 50 ans, mais qui, pour moi, est plutôt centenaire.

Le chef Eric, qui est un MOF, est absent pour raison familiale. La cuisine est tenue par un jeune taïwanais. Nous aurons le menu « solstice d’hiver » avec plusieurs ajoutes : brocciu de Mireille Mameli, petits pois Centogiorni du Vésuve, ail des ours / turbot, asperges blanches et caviar osciètre, sauce chardonnay / homard bleu de Bretagne, la queue pochée au beurre de homard, les parties modestes en gyoza, sauce corail-kimchi / filet de bœuf jersiaise du domaine de Fosse-Sèche comme un Bulgogi / ris de veau aux morilles fourrées / agrumes, pomelos et bergamote, crème glacée citron.

Ce fut d’un raffinement certain et d’une exécution parfaite.

L’entrée ayant un fromage corse, j’ai envie que l’on essaie le vin rouge que j’ai apporté. Comme cela bouscule l’ordre normal des vins, il me paraît opportun que l’on serve les trois vins, et chacun choisira celui qu’il veut associer au plat qui est servi.

Le Champagne Krug Collection 1988 est impressionnant car c’est la « force tranquille » mais non mitterrandienne. La bulle est gentiment active, le champagne a beaucoup de douceur et de noblesse. Il est confortable et très long. Il s’accorde très bien avec une sorte de sashimi délicieux.

Le Montrachet Grand Cru Roland Thévenin 1947 que j’ai déjà bu de nombreuses fois me paraît particulièrement délicieux. Il est moins puissant que certains montrachets, mais je le trouve rond et plein. Avec le ris de veau et la morille, l’accord est idéal. C’est avec la sauce au caviar qu’il fait éclater sa gourmandise.

Le Château Longueville, Baron de Pichon Longueville 1959 avait à l’ouverture un nez pointu et élégant. Il donne l’image du grand bordeaux. Lorsqu’il est servi, le parfum est immense, d’une complexité raffinée. Quel grand vin. Nous avons l’impression d’être face à un vin magistral, un grand bordeaux très long et sophistiqué.

Les trois vins sont brillants, mais à mon goût, le Pichon Baron est à un étage supérieur.

La femme de Guillaume est venue au restaurant et s’est assise au comptoir. A mon invitation elle s’est assise à notre table et les discussions ont été riches et souriantes.

Voilà un restaurant qui me donne envie d’y essayer un de mes dîners. Avec Jonathan bien sûr.

Déjeuner avec Richard Geoffroy dimanche, 4 mai 2025

Richard Geoffroy a été pendant une longue période le renommé maître de chais de la maison Dom Pérignon. C’est vers l’an 2000 que nous sommes devenus amis après avoir bavardé à la fin d’une présentation de Dom Pérignon aux caves Legrand. Nos visions du vin se mariaient tellement bien. Nous nous sommes revus lorsque nos agendas le permettaient. Nous nous rejoignons au restaurant Pages.

Quoi de plus excitant que de choisir des vins pour quelqu’un que l’on apprécie. J’ai pris trois vins, un champagne, un blanc et un rouge.

J’arrive avant 11 heures pour un déjeuner à 12h30, ce qui me permettra après ouverture et composition du menu avec le chef Ken, de profiter de Paris en plein soleil et de boire une bière japonaise, en grignotant des edamames.

Le menu sera : carpaccio de barbue / asperges blanches / lotte à la sauce umami / agneau / wagyu / dessert à la fraise / financiers.

Lorsque Richard Geoffroy arrive, il annonce ce qu’il a apporté. Il vient de créer un vin effervescent de Corse. Ce vin est fait avec des cépages locaux et Richard regrette que les instances officielles aient interdit d’appeler son effervescent : vin de Corse, malgré l’origine des vins. Il est obligé de se contenter de « vin de table ». Il a aussi apporté un saké Iwa, le saké qu’il a créé juste après avoir passé le flambeau de Dom Pérignon à Vincent Chaperon.

Nous commençons donc le repas avec le Vin de table effervescent de Corse d’environ 2 ans. Le pétillant est très bien dosé, d’une puissance contrôlée et ce que l’on remarque, c’est la belle richesse en bouche. Ce vin est agréable, confortable et gastronomique. Il n’est pas handicapé par sa jeunesse.

Le Champagne Lanson 1975 avait eu un petit pschitt sympathique à son ouverture. La bulle est présente. La couleur est d’un or joyeux. En bouche, quel équilibre ! Ce champagne est noble, large et équilibré. Ce n’est que du bonheur. Ce Lanson a une bouteille en forme de quille, forme qui a été utilisée dans les années 60 et 70, période bénie pour la maison Lanson.

Le saké Iwa a des notes marines sensibles et un équilibre confortable et doux en milieu de bouche. Ce qui est amusant, c’est que l’on peut passer de l’un de ces trois vins à l’autre sans que le palais ne montre le moindre rejet. Le vin Corse est agréable mais en devenir, le saké est aussi agréable et confortable et le Lanson est glorieux et éblouissant. Je suis content d’avoir ouvert ce Lanson que Richard ne connaissait pas et a apprécié.

Le carpaccio de barbue avait des tranches que j’ai trouvées épaisses. J’ai demandé des tranches fines beaucoup plus agréables sur les trois vins. Les asperges blanches ont fait vibrer divinement le saké.

Pour la lotte j’ai fait goûter à l’aveugle le vin blanc à Richard, étant sans illusion car ce vin est introuvable. Le Muscadet Sèvre & Maine tiré sur lie, André Vinet-Vallet 1962 est déroutant car jamais on n’attendrait une telle richesse et une telle longueur d’un muscadet. Il est puissant, rond, aimable et n’a pas d’âge. L’accord avec la sauce umami est appréciable. Il est évident que je voulais pour Richard un vin qu’il n’a jamais côtoyé.

Je ne résiste pas au plaisir de recopier le texte écrit sur une languette de papier collée à la capsule et en forme de tonneau : « ce muscadet a été bouché suivant la méthode de nos grands-pères, tiré sur sa lie, de la barrique où il est né, il n’a subi aucun soutirage préalable. Fruité, pétillant, plein de vie et de gaieté, il charme les fins palais. Comme un enfant, il peut subir l’influence des saisons, c’est sa nature même ». C’est un texte d’André Vinet-Vallet. Je ne pense pas qu’il aurait imaginé que son vin serait bu 63 ans plus tard. Tout est vrai dans son texte, sauf le pétillant qui n’existe pas.

Lorsqu’en 2013 nous avions partagé un Dom Pérignon 1929 de ma cave, j’avais apporté une Romanée Conti 1956 et Richard m’avait dit que c’était la première Romanée Conti de sa vie. Aussi mon troisième vin de ce déjeuner est La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1992. Le bouchon était sorti entier et avec facilité montrant un calibrage idéal du bouchon. Ce vin est totalement idéal. Il est riche, joyeux, puissant, noble mais extrêmement accueillant. C’est du plaisir pur. Il aura deux attitudes très différentes. Sur l’agneau, c’est d’Artagnan, prêt à croiser le fer avec nos papilles. Sur le wagyu, c’est Frank Sinatra ou Bing Crosby, montrant qu’au-delà de la puissance il y a un charme fou.

Le Champagne Lanson s’est marié élégamment avec le dessert aux fraises très léger. Nos papilles ont retrouvé le calme avec des financiers.

Richard Geoffroy est insatiable car il a mille nouvelles idées qui vont secouer le monde du vin. Quel bonheur de partager des vins avec ce créateur.

Vers la fin du repas, deux jeunes qui déjeunaient dans la salle avaient vu les vins que nous buvions. L’un des deux dit : peut-être jamais dans ma vie je n’aurai la chance de boire un vin de la Romanée Conti. Je lui ai dit que nous allions arranger ça et j’ai versé un verre de La Tâche pour les deux. Le jeune se montrait insatiable. Je lui ai suggéré de se recueillir pour profiter au mieux de ce vin divin.

Un pommard divin au restaurant Le Sergent Recruteur mercredi, 30 avril 2025

L’ami d’un ami possède au sud de Paris une grande propriété transformée en un restaurant avec quelques chambres. Un immense jardin potager permet une cuisine fondée sur les plantes mais qui couvre beaucoup d’autres domaines. La carte des vins est étonnante car elle explore une myriade de régions. Nous allons parler de l’idée de faire un dîner dans ce lieu.

Comme d’habitude, j’arrive longtemps en avance, quand toute l’équipe du restaurant Le Sergent Recruteur s’affaire pour préparer le déjeuner. J’ouvre le Clos de la Commaraine Pommard Grand Cru Jaboulet-Vercherre 1943. La bouteille est soufflée main et elle est cabossée comme si la main d’un colosse avait pressé le verre comme pour le broyer. Le bouchon vient entier et le parfum est d’une délicatesse rare. Cela laisse pressentir un vin raffiné.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 a un bouchon qui vient en deux morceaux car la lunule du bas reste collée au verre quand on tourne le bouchon. Tout s’annonce parfait comme toujours avec ce millésime réussi de cette belle cuvée.

Après l’ouverture des vins, quand il fait beau, j’adore me promener sur l’île Saint-Louis et sur les trottoirs qui longent Notre-Dame toujours en chantier. Il y a une atmosphère spéciale qui me rappelle des souvenirs, quand il y a environ soixante ans, j’habitais dans l’île Saint-Louis avec ma jeune épouse.

L’ami arrive et nous nous mettons d’accord sur ce menu : Morilles et asperges paysannes sur une royale corsée, ail des ours, fleurette au vin d’Arbois / noix ce ris de veau dorée au basilic, tétragones et girolles en salade, poivrade frit.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 a une jolie bulle et une couleur d’un or clair. Le vin est serein, solide, excité par les rillettes de poisson et l’amuse-bouche à la sauce crémée fort agréable. C’est surtout sur les morilles et les asperges que le champagne va s’épanouir et offrir une richesse d’un bel équilibre. Ce 1979 que j’ai bu 20 fois s’améliore de sa maturité.

Le Clos de la Commaraine Pommard Grand Cru Jaboulet-Vercherre 1943 est une immense surprise. C’est surtout son parfum qui est envoûtant. Il est délicieusement féminin, raffiné et on se contenterait de seulement sentir le vin. En bouche il est subtil et charmeur. Quel plaisir que ce vin délicat à la belle longueur. Le ris de veau est idéal pour mettre en valeur ses subtilités.

La cuisine est toujours aussi intelligente. Aurélien accompagne nos dégustations de commentaires pertinents. Nous avons mis les bases d’un futur dîner qui s’annonce comme une belle aventure.

Dîner avec mon fils avec des vins inhabituels samedi, 26 avril 2025

Mon fils annonce sa venue à la maison pour ce soir. Il faut vite préparer un menu et des vins. Mon fils apporte diverses victuailles surtout pour l’apéritif. Il y aura ensuite du cœur de saumon et des fromages de toutes origines.

Avec mon fils, on peut ouvrir tout ce qui est hors des sentiers battus. Nous commençons par un Tavel rosé 1992 des vignerons de Tavel. Sa robe est riche et c’est une très belle surprise. Il n’a pas beaucoup de complexité, mais il est intense et procure du plaisir. Il accompagne aussi bien rillette que saumon.

Le Charlemagne Jacques Bouchard & Cie, concessionnaire exclusif du Château de Poncié à Fleurie 1943 est un vin qui m’interpelle. Le Château de Poncié appartenait au XIXe siècle à Bouchard P&F. Ils le vendirent au début du XXe siècle, puis le rachetèrent dans les années 90 et ils l’ont revendu depuis. Le fait que Jacques Bouchard intervienne dans cette histoire mérite que je cherche plus d’informations. Ce vin blanc est très intéressant et d’une grande noblesse comparativement au vin de Tavel. Il est un peu fatigué, mais frais et expressif. Il est émotionnel, plutôt que formidable, car il a perdu un peu de sa noblesse. C’est de toute façon un vin qui mérite d’être bu.

Le Chambolle Musigny les Amoureuses Leroy Négociant 1966 apparaît maintenant. Il est comme un animal sauvage qui change de goût à chaque instant. Impossible de donner une définition précise de ce vin, car il change à chaque gorgée. Intriguant, curieux, très intéressant, offrant des saveurs inconnues. J’adore cette expérience énigmatique. Elle fait partie d’un voyage à la recherche de saveurs introuvables.

C’est pour mon fils que j’aime ouvrir et partager de tels vins inhabituels.

Déjeuner avec Salon 1955 et des amis proches vendredi, 25 avril 2025

Ayant dans ma cave deux bouteilles mythiques, j’ai eu envie de faire un déjeuner d’amis autour de ces vins : Champagne Salon 1955 et Champagne Clos du Mesnil Julien Tarin 1955. Le champagne Tarin a été créé en 1698. Il est entré dans le patrimoine de Krug en 1971 et le premier millésime du Krug Clos du Mesnil est 1979. Les vins de Julien Tarin sont très rares et l’association des deux champagnes de Mesnil-su-Oger, Salon 1955 et Tarin 1955 est absolument unique.

J’ai demandé à Didier Depond, président des champagnes Salon et Delamotte de venir à ce repas. Il a accepté avec plaisir. Un ami de Singapour, un autre ami italien, un jeune champenois qui vend du vin se joignent à moi, ainsi que mon fils qui remplace au pied levé un amateur de vin empêché par un événement exceptionnel et inattendu.

L’ami de Singapour apporte un Nuits-Meurgers Henri Jayer 1987, l’ami italien apporte trois Barolos, le jeune marchand de vin apporte les deux plus anciens vins de sa cave, de 1805 et 1835. Didier Depond apporte Salon 1973, d’une année que je souhaitais déguster et Salon 2015 qui n’est pas encore mis sur le marché et qui va précéder Salon 2014 qui ne sera disponible que dans un an.

Les trois amis viendront assister à l’ouverture des vins au restaurant Pages, l’ami de Singapour étant arrivé avant moi, car des pluies en trombe ont figé la circulation dans Paris, faisant de mon trajet en taxi un lent et long pèlerinage.

Du fait des conditions atmosphériques, les bouchons résistent fortement et sont même impossibles pour moi, comme les Barolos dont les bouchons sont plus de bois que de liège. C’est Marcello qui les ouvrira. Le bouchon du Tarin 1955 est assez sale et le parfum n’est pas idéal. Nous verrons.

J’ai eu le temps de bâtir le menu avec le chef Ken et l’occasion était belle d’explorer des pistes inhabituelles. Nous le verrons.

Lorsque Didier Depond arrive, il me montre un Champagne Delamotte Collection 2002 et je lui demande ce qu’il veut en faire, car nous avons beaucoup trop de vins ouverts. Il me répond : « c’est pour boire bien sûr ». Nous commencerons par ce champagne dégorgé il y a quinze jours. Il est d’une solide structure et d’un grand charme. C’est un champagne d’une belle maturité qui peut jouer dans la cour des grands blancs de blancs

Nous passons à table. J’ai demandé un poisson cru et ce sera une sériole à la texture fondante et au goût délicat. Ce poisson accompagne deux vins que tout oppose. Le Champagne Salon 2015 est le champagne qui va être sur le marché incessamment. Quelle belle surprise. Il est déjà gourmand, bien structuré et m’impressionne. J’ai dit à Didier qu’il me fait penser à 1990 ce que Didier approuve.

A côté, nous buvons le Jerez de la Frontera Nelson 1805 qui a ‘seulement’ 210 ans d’écart. Je pensais que les deux se féconderaient et c’est ce qui se passe. Le Xérès a un côté sec et salin qui est très agréable et il est un peu plus rond que ce que j’imaginais. Les deux vins cohabitent bien et le délicieux poisson s’adapte aux deux vins. C’est une belle expérience.

Nous allons en faire une encore plus osée. J’ai demandé au chef Ken de faire un lieu jaune à la sauce légère au vin rouge pour accompagner deux vins que tout sépare. Le Champagne Salon 1973 est généreux et joliment équilibré. C’est un vin souriant et noble. Didier n’en revient pas que ce champagne accepte une sauce vin rouge. Elle avait été pensée pour aller avec le Nuits-Meurgers Henri Jayer 1987 et nous constatons que l’accord se trouve aussi avec le champagne. Ce vin rouge est un trésor de raffinement discret. Tout est fin et suggéré. La chair délicieuse du poisson crée un accord précieux avec le bourgogne rouge.

On peut passer du champagne au vin rouge à condition de passer par la case poisson qui recalibre le palais. Je suis aux anges, car qui aurait osé un tel mariage à trois ?

Nous allons maintenant avoir les trois Barolos de Marcello : Barolo Conterno Monfortino 1937, Barolo Giacomo Conterno Riserva 1937 et le Barolo Giacomo Conterno Picasso 1964. Ces vins sont très rares dont notamment le 1964 dont l’étiquette est un dessin bachique de Pablo Picasso.

Les vins italiens sont riches et puissants et vont accompagner un canard de Challans et des morilles puis du wagyu très pur. Les avis sur les vins ont été très variés entre les participants. J’ai préféré le Riserva 1937 que j’ai trouvé élégant alors que l’autre 1937 a souvent été choisi.

Lors d’un repas avec Arnaud Donckele, nous avions décidé de bousculer l’ordre des plats en mettant une truite après du bœuf d’Aubrac ce qui est hors norme. J’ai eu envie de faire de même en plaçant un turbot après le wagyu pour accompagner les deux champagnes de 1955.

Le Champagne Salon 1955 a une couleur dorée éclatante et offre quelques bulles et un joli pétillant. Ce vin est éblouissant. Quelle présence, quelle maturité. Il est royal et Didier l’apprécie au plus haut point. Sa longueur est infinie.

A côté, le Champagne Clos du Mesnil Julien Tarin 1955, qui avait un niveau assez bas du fait d’un bouchon trop resserré qui avait laissé l’évaporation se développer, est assez fade et manque un peu d’énergie. Mais l’important était que ce vin côtoie le Salon 1995, son conscrit.

Les deux vins les plus anciens vont être servis avec un dessert à la noix puis des financiers à la rose. Le gâteau est sur une assiette sur laquelle on a marqué « joyeux anniversaire ». Une bougie a été plantée pour que je la souffle avec les applaudissements de mes amis.

Le Jerez de la Frontera Nelson 1805 est incroyablement salé et d’une puissance estrême, mais le dessert le rend velouté et incisif.

Le Brown Madeira Madère Impérial 1835 est délicieux et expressif, charmeur et profond comme les grands madères. Un bonheur. Je suis un admirateur des madères.

Nous votons. Le Salon 1955 reçoit quatre places de premier sur six possibles.

Le classement des six est ; 1 – Champagne Salon 1955, 2 – Nuits-Meurgers Henri Jayer 1987, 3 – Champagne Salon 1973, 4 – Jerez de la Frontera Nelson 1805, 5 – Brown Madeira Madère Impérial 1835.

Mon classement est : 1 – Champagne Salon 1955, 2 – Nuits-Meurgers Henri Jayer 1987, 3 – Brown Madeira Madère Impérial 1835, 4 – Champagne Salon 1973, 5 – Barolo Giacomo Conterno Riserva 1937.

C’est à ce moment qu’arrive Naoko Oishi, la propriétaire du restaurant Pages, accompagnée de mon ami Tomo qui est venu avec un Champagne Salon 2013 qui sera un joli point final de notre repas amical. Le Salon 2013 est de belle personnalité, mais mon cœur balance en faveur du Salon 2015, un futur prodige.

Marqué par la générosité et l’amitié, ce repas est un moment exceptionnel de ma vie.

Déjeuner de Pâques et déjeuner d’anniversaire mardi, 22 avril 2025

Le mercredi 23 avril est mon anniversaire, mais nous le fêterons le 21 avril, lundi de Pâques, afin d’avoir avec nous le plus grand nombre de nos enfants et de nos petits-enfants.

Hier, je suis allé au marché acheter du fromage, et dans une autre boutique, j’ai vu de magnifiques asperges et je me suis dit : il me les faut absolument. Et j’ai pensé à un vin rouge.

Mon fils est arrivé ce matin de Miami et m’a proposé des truffes noires sous vide. À l’ouverture, l’odeur des truffes était si intense que je me suis dit : c’est ce qu’il faut avec les asperges pour accompagner le vin rouge de Pâques.

Pour le déjeuner de Pâques avec ma femme et mon fils, nous commençons par le Champagne Réserve Grand Trianon Rothschild 1964 à la très jolie bouteille, qui sera associé à un caviar Baeri de Kaviari. C’est un très joli champagne rond, serein, savoureux, typique des vieux champagnes. Il a une belle présence mais manque – à peine – d’un peu d’émotion.

C’est maintenant l’apparition du Château Ausone 1937 avec des asperges et des truffes noires. C’est l’occasion d’un des meilleurs accords que je n’aie jamais créés. Lorsque j’ai ouvert l’Ausone 1937 à 10 heures du matin, l’odeur était si forte que j’ai décidé de protéger ce goût impérial avec un bouchon en verre. Et au moment du service, c’est un miracle. Si frais, si long, si raffiné, il crée un accord merveilleux.

J’avais acheté cette bouteille il y a probablement 40 ans. Parfaite, sans défaut, pure et glorieuse. Je suis si heureux d’avoir eu cette idée. Nous avons ensuite goûté un Brillat-Savarin et truffe avec l’Ausone, et c’est également un miracle.

La suite se fait avec une bouteille de 50 cl de Tokaji 3 Puttonyos 1972, délicat, doux mais sans excès, parfait sur un flan. C’est un accord calme et délicat. La robe du Tokaji est intense, et le goût est très doux et de belle longueur. Comme j’adore le flan, je suis aux anges.

Pour le repas du soir, j’ouvre un Champagne Ayala 1961. Il s’est passé quelque chose d’incroyable. J’ai voulu ouvrir la bouteille, mais le bouchon a résisté. J’ai pris une serviette pour le dévisser, mais il n’a pas beaucoup bougé. J’ai donc utilisé un outil qui est comme une fourche et s’utilise pour les bouchons de champagne récalcitrants. Tout à coup, le bouchon a sauté d’un mètre en hauteur, produisant un pschitt dynamique. Qui aurait pu imaginer qu’un champagne de 63 ans puisse exploser avec une telle énergie ? Je n’aurais jamais cru que ce soit possible. Cela me rappelle le magnum de Dom Pérignon 1988 de jeudi dernier, dont le bouchon a explosé encore plus fort, touchant le plafond et le blessant. L’Ayala 1961 est extrêmement agréable, paraissant largement plus jeune que le champagne Rothschild Réserve Grand Trianon 1964. Cet Ayala est un grand champagne émotionnel.

Le succès n’est pas toujours au rendez-vous. J’avais en cave un Champagne Krug Private Cuvée des années 50, avec un faible niveau et une couleur terne. Je l’ai ouvert et le parfum était insupportable. Il était sûrement mort. Je l’ai laissé ouvert toute la nuit et le lendemain, j’ai été étonné de constater que la mauvaise odeur avait disparu, ce à quoi je ne m’attendais pas. Quand je l’ai goûté, c’était un champagne endormi, plat, mort. Je n’ai pas insisté. Mais l’attitude que j’ai adoptée devrait être la règle : toujours donner sa chance à chaque vin.

Nous sommes le lundi de Pâques pour fêter en famille mon anniversaire. De grand matin, lorsque j’ouvre le Vosne-Romanée Henri Jayer 1980, je vois que le vin avait été mis en bouteille par un négociant belge, ce qu’on lit sur l’étiquette. Je me suis demandé de quoi il s’agissait, mais à l’odorat, aucune question ne se posait, car un parfum aussi élégant, subtil et romantique ne peut pas provenir d’un vin qui n’est pas d’Henri Jayer. J’ai appris plus tard que le négociant belge avait eu le privilège de mettre en bouteille son allocation d’Henri Jayer.

J’ai aussi ouvert l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1958, qui dégageait un parfum merveilleux. Les vins seront servis quatre heures plus tard sur du wagyu.

Le repas commence avec le Champagne Ayala 1961 qui a gardé une grande élégance et qui est plus fringant que le reste du Champagne Réserve Grand Trianon Rothschild 1964.

L’Hermitage La Tourette Delas blanc 1987 accompagne un cœur de saumon absolument délicieux. Le vin est gentiment gourmand et d’un beau fruit. C’est un Hermitage très agréable à boire avec un aimable goût de ‘revenez-y’.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1958 a un nez et un goût de rose. Il est plutôt puissant. Sa personnalité est belle et sereine. C’est un grand vin.

Le Vosne-Romanée Henri Jayer 1980 est très différent, élégant, précis, raffiné. Les deux sont merveilleux à boire. Il est très difficile de dire lequel est le meilleur. Le wagyu est naturellement fait pour élargir la puissance de l’Echézeaux et l’on pouvait craindre qu’il fasse peur au sensible Vosne-Romanée, mais en fait le 1987 trouve lui aussi un tremplin avec la si gourmande viande.

Nous avons dégusté ensuite les deux vins sur du Brillat-Savarin et de l’Époisses, ce qui était un accord aussi passionnant, le Jayer éclatant sur le Brillat-Savarin et le Conti éblouissant sur l’Epoisses. Au final, j’ai eu une préférence pour l’Echézeaux, plus riche, plus complexe, plus en adéquation avec mon tempérament. Mais le Jayer était si fin et délicat que je l’ai adoré aussi. Un grand moment.

Le champagne a accompagné un fraisier de grande élégance.

Les deux repas ont formé un ensemble et mon classement est : 1 – Ausone 1937, 2 – Echézeaux 1958 3 – Vosne-Romanée 1980, 4 – Tokaji 1972, 5 – Ayala 1961, 6 – Hermitage 1987, 7 – Trianon Rothschild 1964.

Les vins du 4ème au 7ème étaient très agréables et pourraient être presque ex æquo dans le classement tant ils sont d’un intérêt similaire.

Les meilleures combinaisons vins et plats ont été : 1 – Asperges + truffe avec Ausone 1937. 2 – Epoisses et Echézeaux. 3 – Wagyu et Vosne-Romanée.

J’étais vraiment heureux de ma sélection de vins très différents.

295ème dîner au restaurant Astrance vendredi, 18 avril 2025

Le 295ème dîner se tient au restaurant Astrance. Le nombre de participants a fait du yoyo car un convive inscrit est tombé malade trois jours avant le dîner et un autre inscrit n’avait pas fait signe de vie le jour du dîner. Nous nous sommes quand même trouvés à onze, dont un couple de norvégiens pour qui c’est le deuxième repas, deux américains parmi les plus assidus de mes dîners, et six français dont deux venaient pour la première fois.

J’avais envoyé un mail de rappel qui portait en gros caractères l’heure du rendez-vous. Ce fut efficace car pour une fois, tous les convives sont arrivés avant l’heure officielle du repas. J’apprécie.

Le menu qui a été élaboré avec Pascal Barbot, le chef d’Astrance, extrêmement motivé et impliqué dans des créations faites pour les vins, est : gougères, tuiles de chiche et gribiche aux algues, huître et Pata Negra / asperges vertes de Roques-Hautes servies croquantes et amandes / filet de turbot vapeur, riz Koshihikari, asperges blanches et beurre blanc sauce soja / médaillon de homard et bisque de crustacé / entrecôte de bœuf wagyu de Hida, sauce poivrée / asperge blanche, compté trente mois et noix / flan pâtissier, légèrement vanillé / tartelette minute aux agrumes.

Je suis arrivé avant 16 heures pour ouvrir les vins du dîner et je serai rejoint par un des fidèles de mes dîners. J’avais apporté ce qui restait du Veuve Clicquot 1966, de l’Y d’Yquem 1977 et du Cheval Blanc 1966 du déjeuner de la veille pour que cet ami et le sommelier Lucas puissent les goûter. Les vins étaient encore en parfaite condition. Ils ont été finis.

A l’ouverture des vins, tous les parfums ont été superbes, parfois très épanouis au point que j’ai mis un bouchon pour conserver le parfum unique et glorieux du Haut-Brion 1950.

Une autre surprise concerne les bouchons. Ils sont presque tous venus entiers sans trop d’effort sauf le Chevalier-Montrachet 2002 dont le bouchon très serré m’a demandé un gros effort. Comme j’avais vu la veille le même comportement des bouchons je me demande si les conditions atmosphériques ne jouent pas un rôle dans la facilité ou la difficulté d’extirper les bouchons. Lucas m’a aidé pour quelques bouteilles. L’ami fidèle a offert un champagne dont ont profité quelques participants arrivés en avance.

Lorsque tous les convives sont présents, je donne les indications pour profiter au mieux du repas pendant que l’on nous sert le Magnum de Champagne Dom Pérignon 1988 dont le bouchon avait explosé quand je l’ai ouvert, le bouchon frappant fortement le plafond, à ma grande surprise. Le champagne est délicat et raffiné mais il est moins puissant que ce que j’attendais. Pascal Barbot a présenté une huître surmontée de Pata Negra et cette combinaison donne au champagne une longueur incroyable, très minérale. Cela contraste avec l’accord que créent les gougères, fait de charme infini.

Le Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1976 est une surprise pour tous les convives. Il est rond, cohérent, intense, au message d’une richesse extrême, lourd et pénétrant. L’accord avec les asperges est sublime et renforce le champagne. C’est un grand moment.

Pour le plat de turbot, j’avais demandé qu’on corrige une erreur dans la transcription du menu, qui faisait que le plat était associé au Magnum de Chevalier Montrachet La Cabotte Bouchard Père et Fils 2002 mais aussi au Château Haut-Brion 1950. Le plat ne devait comporter que le vin blanc. Lorsqu’on sert peu après le Haut-Brion, je tique à peine et je n’y fais pas plus d’attention car je suis occupé par les discussions avec les participants.

Le Chevalier Montrachet La Cabotte Bouchard Père et Fils magnum 2002 est un vin que j’adore, dont l’appellation Cabotte n’a été donnée à ce vin que dans les années 1990. Le vin est riche et brillant, facile à comprendre et l’accord est naturel. C’est une beau et noble vin.

Mais quand apparaît le Château Haut-Brion 1950, tout le monde est subjugué. Le vin est d’une richesse incroyable, solide, puissant et sans âge. Son énergie est rare et l’accord est parfait. Le vin rouge convient au poisson magnifiquement cuit, alors que le vin blanc se régale avec le riz exceptionnel et avec les asperges blanches. En fait, l’erreur commise a permis des accords différents mais cohérents. Le Haut-Brion nous a subjugués par sa puissance et sa longueur.

Le Savigny Chanson Père & Fils 1928 me séduit, car il est d’une année que j’adore, l’une des plus grandes du 20ème siècle. Alors, j’apprécie ce vin avec ferveur, d’autant que la chair du homard et surtout la bisque le rendent brillant. Ce qui est étonnant, c’est que je mettrai ce vin second dans mon vote, alors qu’il ne figurera pas dans les six premiers de l’ensemble de la table.

Le Corton Grancey Louis Latour 1943 est un vrai velours que le wagyu fait rayonner. C’est un bourgogne élégant et gourmand, si consensuel. A côté de lui, l’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1989 a le charme des vins de la Romanée Conti, mais le Corton convient beaucoup mieux au wagyu.

Le Château Chalon Château de la Muyre 1967 avait à l’ouverture un parfum d’une puissance incroyable. J’ai demandé à Pascal Barbot de mettre des morceaux d’asperge blanche et l’accord est divin dans l’opposition des amertumes. Le délicieux et riche Comté révèle d’autres facettes du talent du vin du Jura brillant.

J’avais demandé à Pascal Barbot un flan pour le Clos du Bourg Vouvray Huet 1959. Son flan est sublime et l’accord avec le très sensuel vouvray est absolument divin. Le vin est joyeux et l’accord est le plus beau de ce repas. Si ce vin est apparu deuxième dans le classement final, cela tient au vin bien sûr, car il est élégant, mais cela tient surtout à la magie de l’accord gourmand.

Le Château d’Yquem 1966 avait à l’ouverture un parfum seigneurial. Maintenant ce parfum est papal. Quelle amplitude, quelle puissance ! Cet Yquem est puissant, large sans excès, d’un équilibre serein. Le dessert aux agrumes est délicat, mais les peaux des agrumes sont un peu trop fortes pour le sauternes.

Nous sommes impressionnés par le fait que tous les vins ont été au sommet de leur art. C’est particulièrement réjouissant.

C’est l’heure du classement. Ce qui est particulièrement plaisant, c’est que chaque vin a eu au moins trois votes, ce qui est très rare, car il y a très souvent un ou deux vins ignorés dans les votes. Cela prouve une qualité très grande de tous les vins.

Six vins ont été nommés premiers, le Haut-Brion trois fois, l’Echézeaux, le Chateau Chalon et l’Yquem deux fois, le Corton et le Clos du Bourg une fois.

Le classement global de notre table est : 1 – Château Haut-Brion 1950, 2 – Clos du Bourg Vouvray Huet 1959, 3 – Château Chalon Château de la Muyre 1967, 4 – Corton Grancey Louis Latour 1943, 5 – Château d’Yquem 1966, 6 – Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1989.

Mon classement est : 1 – Château Haut-Brion 1950, 2 – Savigny Chanson Père & Fils 1928, 3 – Château Chalon Château de la Muyre 1967, 4 – Clos du Bourg Vouvray Huet 1959, 5 – Château d’Yquem 1966.

Alors que les français étaient majoritaires nous avons beaucoup parlé en anglais. L’ambiance a été souriante et amicale. Pascal Barbot est venu souvent expliquer les plats. Son enthousiasme et son implication sont un plaisir à entendre.

Ce fut un dîner particulièrement chaleureux et réussi.

Trois vins superbes au restaurant Pages jeudi, 17 avril 2025

Ma femme est partie dans le sud avec notre fille cadette. Elle ne sera pas avec moi pour fêter nos 59 ans de mariage. Je vais déjeuner avec deux personnes du monde du vin au restaurant Pages. Pour honorer notre mariage, j’ai pris avec moi deux vins de l’année 1966, celle de notre mariage. Le troisième vin n’a pas un millésime qui serait relié à un événement.

Arrivant en avance, je mets au point le menu avec le chef Ken et Pierre Alexandre, le directeur du restaurant. Ce sera : amuse-bouche / poisson cru / asperges blanches servies froides / lotte / canard aux carottes / dessert aux premières fraises proposé par le pâtissier Lucas.

Le bouchon du Cheval Blanc 1966 est magnifique, le niveau du vin est dans le goulot et le parfum indique que le vin sera grand. Le Veuve Clicquot 1966 a aussi un joli bouchon et son parfum est curieux, fait de fruits rouges, ce qui est étonnant.

Je n’ouvre pas l’Y d’Yquem 1977 car je ne sais pas si mes convives envisagent que nous goûtions trois vins.

Le Champagne Veuve Clicquot Ponsardin 1966 m’a semblé largement meilleur que le 1962 et le 1990 dégustés vendredi dernier à l’hôtel du Marc. Ma cave est peut-être meilleure, je ne sais pas. Ce champagne est glorieux, intense et complexe. Une merveille. A noter que les amuse-bouches dont nous n’avions pas parlé avec Ken n’ont créé aucun accord pertinent avec le champagne qui s’est mis à briller sur le poisson cru divin.

L’Y d’Yquem 1977 présente un botrytis important. Il rend ce vin rond et très agréable. Avec des asperges blanches, l’accord est magique. Je ne m’attendais pas à un 1977 de ce niveau. Je pense que ce vin d’une année plutôt légère fait ressortir le botrytis. Le vin blanc à la couleur très claire au brillé aussi sur la lotte.

Le Château Cheval Blanc 1966 est la plus grande surprise. Ce vin est la perfection pure. Incroyable. Tout est parfait. Puissance, longueur, subtilité, intensité. Ce vin est un mystère, tant il est grand. Il est superbe à boire avec du canard simplement cuisiné.

Le pâtissier Lucas nous avait proposé un dessert à la fraise dont la saison commence. Ce dessert léger et délicat a été accompagné par un champagne brut non dosé, formant un bel accord.

J’avais rendez-vous après le déjeuner avec Arnaud Donckele et son équipe de Plénitude, pour mettre au point un prochain dîner. J’ai apporté les trois vins dont il restait une quantité suffisante. Ils ont été surpris par la perfection du Cheval Blanc 1966. Je l’avais ouvert plus de cinq heures auparavant et c’est un vin que j’avais dans ma cave depuis plus de cinquante ans.

Les trois vins de ce déjeuner se sont montrés à leur plus haut niveau de perfection.